Ce mardi 19 novembre, en fin d’après-midi, lors d’une réunion extraordinaire du Comité Sociale et Économique (CSE) d’Arcelor Mittal centre de service de Denain la direction a annoncé aux salariés qu’en raison de la baisse d’activité que connaît l’entreprise depuis la pandémie de Covid-19, deux sites français d’Arcelor Mittal sur les huit existants devraient fermer leurs portes. Les sites directement, concernaient par cette décision sont les sites d’Arcelor Mittal de Denain ainsi que le site d’Arcelor Mittal de Reims. En protestation les salariés ont immédiatement engagé un mouvement de grève pour protester contre ce plan de licenciement jugé inacceptable d’autant plus que l’entreprise a pu bénéficié de l’argent public notamment avec par exemple la rénovation des voies ferroviaires pour permettre l’acheminement de matériaux jusqu’au site de Denain ou encore l’aménagement de la voirie pour permettre au poids lourd d’accéder plus facilement au site. Des travaux engagés par les autorités publiques sur la promesse d’Arcelor Mittal de maintenir l’activité sur le site.
De ce fait, ce mercredi 20 novembre, les militants du PRCF se sont rendus sur le piquet de grève d’Arcelor Mittal à Denain pour apporter le soutien du PRCF aux grévistes dans cette lutte légitime. Ils ont pu alors s’entretenir et échanger sur la situation avec les travailleurs en lutte et en particulier avec Clément syndiqué CGT qui a partagé son vécu et ses préoccupations face à la fermeture du site. Nous vous proposons une retranscription de cet entretien :
IC : Bonjour à tous et toutes nous sommes le mercredi 20 novembre, nous sommes sur le site d’Arcelor Mittal à Denain et hier a été annoncé un “plan d’action social et de sauvegarde de l’emploi” qui débouchera malheureusement probablement sur la fermeture du site d’Arcelor Mittal à Denain. Nous sommes avec Clément syndiqué CGT qui est travailleur ici et directement menacé de licenciement par ce plan anti-social. Alors tout d’abord est ce que tu peux revenir sur ce qui s’est passé hier ?
Clément : Oui hier suite à une réunion extraordinaire du CSE, dont ils étaient complètement sans informations sur le type de réunion qu’ils allaient avoir, on nous a appris sèchement la fermeture de 2 sites sur 8 d’Arcelor Mittal distribution service, dont celui de Denain.
IC : Donc aucune véritable information, c’est comme ça et puis c’est tout ?
Clément : Oui c’est comme ça pour des raisons économiques avec un manque de volume, un manque de clients qui est en perte depuis les années COVID ce qui fait qu’aujourd’hui le pseudo taux de rentabilité ne serait plus présent.
IC : Donc des raisons économiques pour les dirigeants ?
Clément : Oui et surtout pour les actionnaires.
IC : Mais, on est d’accord qu’Arcelor Mittal réalise des bénéfices ?
Clément : Oui bien sur Arcelor Mittal c’est plus d’1 milliard de bénéfice l’année dernière et en progression sur cette année. Donc une industrie et une famille solide sur le côté financier et donc une décision incomprise pour les ouvriers par rapport aux bénéfices dégager par la société.
IC : En l’occurrence, ça veut dire que l’on désindustrialise ici et que l’on redéploye ailleurs ?
Clément : Oui, je pense qu’il y a une volonté. Des doutes et des on-dit, on partirait sur l’hypothèse que la famille Mittal souhaiterait retirer l’entièreté de ses billes en Europe et donc notre site pourrait être le premier maillon d’une désindustrialisation métallurgique en France et en Europe.
IC : Donc Denain est touché, Reims est touché…
Clément : Reims est touché et l’intégralité des travailleurs est à l’arrêt aussi depuis ce matin comme nous en raison de l’annonce de la direction sur la fermeture des sites.
IC : Et il y a un risque que ces fermetures se répercutent aussi sur Dunkerque ?
Clément : Oui aujourd’hui si nos doutes sont fondés il y a des risques pour le site de Dunkerque. Malgré le fait que Dunkerque ait la plus grande aciérie d’Europe au niveau d’Arcelor Mittal, qu’il y a des projets de décarbonisation et d’acier vert avec une aide de l’Etat de plus de 800 millions d’euros.
IC : Donc la totalité de vos effectifs sur votre site sont en grève. Comment cela se passe pour ces premiers jours ?
Clément : Aujourd’hui c’est avant tout se remettre d’une annonce brutale, les gens sont un peu sonnés. Même si la charge de travail n’est plus ce qu’elle était il y a deux ans en arrière, on ne pouvait pas supposer une fermeture si rapide et brutale du site.
IC : Vous avez déjà pu recevoir des soutiens ?
Clément : Oui un soutien de la mairie de Denain qui a été présente dès ce matin à 8h pour nous aider et apporter le soutien à la mobilisation et à la sauvegarde de l’emploi sur le site.
IC : Un soutien notamment matériel on l’imagine ?
Clément : Oui un soutien matériel car la ville et l’agglomération ont réalisé un important soutien financier notamment avec d’importants travaux sur l’ancienne friche Usinor où beaucoup de société comme Amazon se sont installées, il y a eu des créations de voiries des rénovations ferroviaires dont Arcelor Mittal s’était porté garant de l’utilisation et qui aujourd’hui fait complètement machine arrière et recule sur le sujet. Alors oui de l’argent de l’Etat a été dépensé pour la sauvegarde d’une société qui aujourd’hui annonce la fermeture du site.
IC : On peut le dire clairement qu’aujourd’hui vous êtes victimes de cette logique capitaliste.
Clément : Oui d’une logique capitaliste et d’actionnaires qui en veulent toujours plus.
IC : Est-ce que tu penses que cette logique de désindustrialisation touchera d’autres pays en Europe ?
Clément : Oui je pense que l’intégralité des pays adjacent à la France comme la Belgique et l’Allemagne auront des soucis à se faire en tout cas au niveau Arcelor Mittal pour les prochaines années.
IC : Des délocalisations en dehors de l’Europe mais est-ce que tu penses qu’il serait possible que certaines délocalisations se fassent au sein de l’Union Européenne ? Est-ce que Arcelor Mittal pourrait chercher à redéployer son activité à l’Est de l’Europe ?
Clément : Oui clairement, il y a des rumeurs d’installation d’usine en Pologne, on savait déjà qu’une partie de la matière allait partir en Pologne vu que l’on connait les charges et salaires à bas coût dans ces pays-là.
IC : La fameuse concurrence dite libre et non faussé.
Clément : Voilà.
IC : Le PRCF vient ici pour la première mais pas la dernière fois, nous allons revenir car comme partout en France nous soutenons tous les travailleurs en lutte notamment les ouvriers en lutte sur des sites aussi stratégiques que la métallurgie. Et nous ne pouvons vous souhaiter qu’à la fois bon courage d’une part et d’autre part être assuré de notre soutien et de notre appui avec on l’espère une issue positive.
Clément : On espère une issue positive même si malheureusement on sait que lorsqu’une décision est prise au niveau de la direction le retour en arrière est toujours délicat.
IC : Bon courage à vous et bon courage aux travailleurs d’Arcelor Mittal ainsi qu’à tous les travailleurs en lutte.
La lutte de ces ouvriers qui furent récent mis à l’honneur pour leur travail sur la fabrication des anneaux Olympiques est emblématique d’une situation bien plus large. En effet, la fermeture de ce site industriel s’inscrit dans un phénomène plus global de désindustrialisation qui met aujourd’hui en péril des milliers d’emplois en France et en Europe de l’Ouest. Ainsi, les travailleurs d’ArcelorMittal ne sont qu’un exemple parmi d’autres de ce processus comme le montre une carte publiée par « Les Echos » un nombre important d’emploi en France sont en danger. De la même manière, on apprenait vendredi 22 novembre que la société le Coq Sportif dont le site de production se trouve en France est également placé sous redressement judiciaire menaçant de ce fait près de 330 emplois.
Alors que le gouvernement Macron multiplie les discours sur la « réindustrialisation » de la France et la « souveraineté européenne » ces discours semblent en décalage total avec la réalité vécue par des milliers de salariés qui se retrouvent aujourd’hui menacés de perdre leur emploi. Une destruction des emplois entrainé notamment par la concurrence déloyale qui s’exerce à l’échelle de l’Union Europe sous l’égide du principe de la concurrence libre et non faussé. Cette doctrine expose les industries nationales à une compétition effrénée face à des pays aux coûts salariaux bien inférieur entrainant de ce fait la délocalisation de la production à l’Est de l’Union européenne ou dans le reste du monde. Une politique économique qui amène aussi la signature d’accords commerciaux destructeur comme le traité Mercosur qui risque de mettre une pression supplémentaire sur l’agriculture française alors que celle-ci fait d’ores et déjà face à une importante crise.
C’est la raison pour laquelle le PRCF soutient la lutte des ouvriers d’Arcelor Mittal ainsi que toutes les autres luttes menées par les travailleurs. Plus que jamais il est nécessaire de reconstruire un grand parti communiste de classe et de masse, de reconstruire la solidarité de classe pour lutter tous ensemble et en même temps.